La grenade commerciale de Trump percute la filière lait française

« Le jour de la libération ». Un encombrant tableau truffé de chiffres en main, les applaudissements nourris d’un auditoire acquis à sa cause, Donald Trump a encore fait dans le spectaculaire pour annoncer le début d’un séisme commercial. Comme il l'avait menacé il y a plusieurs semaines, le président des États-Unis a imposé le 2 avril 2025 de façon unilatérale, une série de tarifs douaniers additionnels, calculés sur des bases encore obscures mais qualifiés de « réciproques ». Pour l’Union européenne, cela signifie une hausse de 20 % pour tous les produits qui franchissent les frontières américaines, ses voitures… comme ses fromages et ses vins. À des degrés divers, aucun pays du monde n’est épargné. De la Chine avec 34 % au Royaume-Uni ou le Brésil avec 10 % en passant par l’Inde avec 26 %.

Dans la foulée des annonces de son chef, Jamieson Greer, le représentant au Commerce extérieur américain, assurait le SAV. « Le manque actuel de réciprocité commerciale, démontré par notre déficit commercial chronique, a affaibli notre sécurité économique et nationale », a-t-il justifié. « Le président Trump a donné la priorité à une action rapide pour apporter la réciprocité à nos relations commerciales et réduire le déficit commercial », a-t-il ajouté, anticipant une liste non exhaustive de retombées positives pour l’économie américaine.

Macron invite les filières à l’Élysée

Alors que nombreuses entreprises sont plongées dans l’incertitude, Emmanuel Macron a convié le 3 avril, les représentants des filières les plus touchées au palais présidentiel, où le Premier ministre François Bayrou et plusieurs ministres étaient aussi présents. Le président a notamment qualifié la manœuvre de Trump de « décision brutale et infondée » qui entrainera une riposte « massive » qui sera annoncée à la fin du mois après une étude « secteur par secteur ». Emmanuel Macron a en tout cas exhorté les représentants des filières à travailler avec leurs homologues européens et à rester « unis et déterminés ».

Le secteur laitier très impacté

La filière laitière française est particulièrement impactée, tant le marché américain est important. « La France y exporte 350 millions d’euros de produits laitiers dont un peu plus de 200 millions de fromages. En Europe, on exporte un peu plus de 2,3 milliards de produits laitiers vers les États-Unis », a notamment rappelé le 3 avril Baptiste Buczinski, agroéconomiste à l’Idele, à l’occasion du Grand angle lait. « Il y a une inquiétude sur ces volumes car 20 % de taxe supplémentaire c’est relativement important, notamment pour le beurre où il y a un peu plus de disponibilités en ce moment », précise-t-il. « Pour les fromages, c’est plus difficile à dire, tout dépend si cette hausse est acceptable pour le consommateur américain. »

La présidente de la Commission « regrette profondément »

Les annonces à peine tombées, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a immédiatement réagi à ce « coup dur » dans un communiqué . La présidente de l’exécutif européen, a ajouté qu’elle « regrette profondément » et prévient que « l’économie mondiale va souffrir massivement ». Si elle admet toutefois que « certains prennent un avantage injuste des règles actuelles » l’utilisation des tarifs douaniers « ne résoudra pas le problème », selon elle.

Alors que la Commission avait déjà annoncé une série de contremesures face aux menaces de hausse des tarifs pour l’acier et l’aluminium, elle assure que de nouvelles décisions sont à venir « pour protéger nos intérêts et nos entreprises si les négociations échouent ». Car les négociations devraient se poursuivre entre le commissaire au Commerce Marcos Šefčovič et ses homologues américains. Dans une ambiance tendue à n'en pas douter.